Journée d’études
La professionnalisation en communication au prisme du genre, de la diversité et de l’inclusion
Mardi 8 novembre 2022 (en ligne)
Réception des propositions : 30 septembre 2022
Depuis une décennie, des mouvements sociaux importants ont porté dans l’espace public les enjeux de « la diversité », fût-elle culturelle, de genre, identitaire ou nationale, corporelle, neurologique, sexuelle, ou intersectionnelle. L’intensification des flux migratoires, les dénonciations de racisme, d’âgisme ou de sexisme systémiques, la mondialisation de la main-d’oeuvre et la course aux talents sont autant de dynamiques socioéconomiques et socioculturelles qui ont mené les sociétés et les organisations à se saisir de « la diversité », voire à tenter de la gérer (Garner-Moyer, 2006). Bien qu’elle fasse « référence aux différences entre les individus sur n’importe quel attribut qui peuvent conduire à la perception qu’une autre personne est différente » (van Knippenberg et al., 2004. ), cette diversité pose des défis sur le plan épistémique – quelle diversité? – mais également éthiques – quelles normes? pour quelles finalités?
Les enjeux du genre, de l’inclusivité et de la diversité (GID), également libellés « équité, diversité, inclusion » (EDI), touchent un ensemble d’organisations, mais aussi les communications marchandes (Andréani et al., 2008a), les industries culturelles et créatives (Kiyindou, 2013) et les médias (Rebillard, Loicq, 2013 ; Seurrat, 2010b) dans un faisceau d’objectifs, allant de favoriser une meilleure créativité ou une meilleure performance (De Dreu & West, 2001; Facchini, 2008; van Knippenberg et al., 2004) à préserver la richesse culturelle émanant de différentes communautés, ainsi qu’à offrir une meilleure représentation des minorités dans la communication publique (Roginsky, 2021). « Ainsi, les enjeux économiques de la diversité culturelle d’un côté, la nécessité de penser la dimension économique de la communication de l’autre, poussent, presque naturellement, les SIC à interroger les rapports entre globalisation économique uniformisante et revendications culturelles spécifiques » (Dacheux, 2013, 5).
Aussi délicate et ambigüe soit cette question, « la diversité » en sciences de l’information et de la communication reste souvent abordée en termes d’analyse des représentations (Roginsky et al., 2021): celles transmises dans les actions de communication comme la publicité (ex. Andréani et al., 2008b; Kunert & Seurrat, 2013), les médias d’information (Bidima, 2007; Cervulle, 2021; Seurrat, 2010b), les politiques publiques, ou les industries culturelles (Mattelart, 2009). Toutefois, peu de travaux prennent en compte les enjeux GID (ou EDI) sous l’angle des acteurs qui produisent cette communication. Pourtant, prendre en compte la diversité de point de vue des SIC, c’est aussi s’attarder sur celles et ceux qui construisent des discours et des dispositifs en faveur de « la diversité ».
Mais qui sont les acteurs en charge de « la diversité » dans les organisations? Quelles sont leurs formations, leurs trajectoires, leurs compétences? En quoi la professionnalisation des fonctions relatives au genre et à la diversité concerne la professionnalisation en communication? Et quelle est la place des questions de genre et de diversité dans la formation en communication? En somme, comment les professionnels de la communication se saisissent-ils de cette diversité, entretiennent-ils les stéréotypes à l’origne de l’exclusion ou, à l’inverse, produisent-ils les contenus valorisant les représentations de « la diversité », font-ils la promotion des guides, chartes et codes ?
Lors de cette journée d’étude, le Réseau international sur la professionnalisation des communicateurs (RESIPROC) et l’Association française des managers de la diversité (AFMD) souhaitent aborder ces questions en croisant les perspectives professionnelles et académiques et en favorisant une approche comparative internationale. Cette journée d’étude se veut avant tout collaborative et centrée sur les échanges et débats. Aussi s’articule-t-elle autour de tables rondes entre chercheuses et chercheurs et personnes issues du milieu professionnel qui tenteront d’éclairer les enjeux d’inclusion et de diversité.
Le RESIPROC appelle les chercheuses et chercheurs, émergents comme établis, à soumettre des questions de recherche sous la forme d’un court texte présentant leur question de recherche et les méthodes mises en œuvre.
Les propositions de communication pourront s’inscrire dans les quatre axes ci-dessous :
Axe 1 : La professionnalisation de la fonction diversité dans les organisations
Depuis une vingtaine d’années, il s’opère une institutionnalisation de la gestion de la diversité dans les organisations, aussi bien les entreprises que les institutions publiques (Doytcheva, 2009; Senac, 2010). Celle-ci se traduit par l’élaboration de chartes, de référentiels, de labels (Brousillon, Pierre, Seurrat, 2007), mais aussi par l’émergence d’une fonction, celle de « responsable de la diversité » (Maizeray, Sciberras, 2013). Or qui sont ces personnes ? Quelles trajectoires les a conduites à exercer cette fonction ? Dans quelle mesure la professionnalisation relative aux problématiques liées au genre (Roginsky, Millette, Lépine, 2021) est-elle un modèle pour la professionnalisation de la fonction diversité ? Quel est leur niveau hiérarchique et leurs moyens alloués au sein des organisations ? Quelles sont les compétences liées à cette fonction et quelle est la place des compétences communicationnelles ?
Axe 2 : Les questions relatives à « la diversité » dans les formations à la communication
Si la question de la diversité dans les organisations est liée à l’exercice de ces nouvelles fonctions, elle est également de plus en plus présente dans la formation à la communication (Scotto et al. 2009). Quelle est la place attribuée aux questions relatives au genre, à la diversité et à l’inclusion dans la formation initiale et la formation continue en communication ? S’agit-il d’enseignements spécifiques ou de questions abordées dans le cadre d’autres enseignements ? Ces derniers ont-ils une visée critique ou plus opérationnelle ? Qui prodiguent ces formations et dans quel contexte? Quels en sont les contenus, les objectifs et les modes d’évaluation ? Dans quelle mesure les questions relatives à la diversité invitent-elles à repenser plus largement la formation des professionnels de la communication ?
Axe 3 : La place des associations dans les dynamiques de professionnalisation sur les questions de genre, diversité et inclusion
Depuis le milieu des années 1970 a été mise en place au niveau européen une politique publique de lutte contre les discriminations envers les femmes et de promotion de l’égalité. La démarche et les pratiques de travail pour y parvenir ont été analysées dans la littérature scientifique, en science politique particulièrement (Sénac, 2012). En quoi les discours sur les questions de GID dépendent des types d’organisations qui les portent? Quelles sont les caractéristiques de ces discours? Un premier type de questionnements porte ainsi sur les modalités discursives des acteurs investis sur les questions de GID et les spécificités de celles-ci. Un second type de questionnements s’intéresse plus spécifiquement aux associations professionnelles et au(x) rôle(s) qui leur incombent dans la définition et la circulation des enjeux de GID dans le champ professionnel de la communication.
Également, les dispositifs déontiques – codes, chartes, règles – ont une force constitutive, en cela qu’ils engagent des discours, des actions, des productions souhaitant encadrer les pratiques des professionnels en communication (Bender, 2004; De la Broise, 2013). Quelle est la place des associations dans l’élaboration et la mise en circulation de normes, de référentiels de pratiques sur « la diversité » dans les organisations ?
Axe 4 : Dimensions territoriales de la diversité
La problématique GID se présente différemment en fonction des contextes territoriaux (Hofstede, 2003). Ainsi, la diversité ethnique ou religieuse demeure taboue au sein de certaines organisations, et, a contrario, fortement politisées dans certains pays (Rwanda, Côte d’Ivoire, etc.) (Brasseur, 2008). S’intéresser à la question GID dans ces ressorts territoriaux conduit à questionner l’existence des professionnels en charge de ces questions au sein des organisations (économiques, sociales, politiques). Existe-t-il des «responsables à la diversité» dans ces pays/organisations à l’instar de ce que l’on observe dans les sociétés occidentales? Si oui, qui sont-ils, dans quels types d’organisations travaillent-ils et quelle a été leur trajectoire professionnelle?
Calendrier
- 8 septembre : Ouverture de l’appel à questions de recherche.
- 30 septembre : réception des propositions
- 8 octobre : Confirmation aux auteurs et autrices
- 8 novembre 2022 : Journée d’études
Modalités de soumission
Le format particulier d’une journée d’étude permet de croiser les questions éclairant les enjeux GID et les recherches actuelles. Aussi, les autrices et auteurs sont invités non pas à présenter des résultats de recherche, mais bien à soumettre des questions de recherche et des pistes de réflexion. Lors des différentes tables rondes, ces questions seront exposées, et débattues entre professionnels de « la diversité » et chercheurs et chercheuses travaillant sur ces questions.
Le résultat de la journée fera l’objet d’un article publié dans le numéro anniversaire de Communication & Professionnalisationdans lequel chaque personne contributrice sera nommée.
Contenu des présentations
- L’axe dans lequel il s’inscrit
- Une contextualisation de l’enjeu GID soulevé
- La ou les questions souhaitant être débattue
Normes de présentation
- Une page de garde avec le nom, l’affiliation et les coordonnées des personnes autrices
- 500 mots, excluant la bibliographie
- Times New Roman, 12 pts, interligne et demie
- Références selon les normes APA
Modalités de la journée d’étude
La journée procédera d’abord d’une présentation d’ouverture suivi de deux cycles de table ronde mettant en dialogue les milieux professionnel et académique. À la fin de la journée, une séance plénière permettra de tirer des orientations sur un programme de recherche possible en GID-communication. Ce programme sera le point de départ de l’article publié dans Communication & Professionnalisation.
La journée aura lieu en ligne et le lien sera communiqué avec le programme.
Propositions à envoyer avant le 30 septembre à : jediversite@gmail.com
Comité organisateur
- Dany Baillargeon, professeur agrégé, Département de communication, Université de Sherbrooke, Centre de recherche sur le vieillissement
- Vincent Brulois, maître de conférences en sciences de l’information et de la communication, Université Sorbonne Paris-Nord (USPN), LabSIC (UR 1803)
- Josianne Millette, professeure agrégée, Département d’information et de communication, Université Laval, LabCMO, LabFluens, Réseau québécois en études féministes (RéQEF).
- Sandrine Roginsky, professeure en communication, Université catholique de Louvain
- Aude Seurrat, professeure des Universités en sciences de l’information et de la communication, Université Paris-Est Créteil (UPEC), membre du Céditec
- Namoin YAO – BAGLO, Centre d’Etudes et de Recherches sur les Organisations, la Communication et l’Education (CEROCE), Maître de conférence/ISICA – Université de Lomé
Présentation du RESIPROC
Le Réseau international sur la professionnalisation des communicateurs (RESIPROC) a pour objectif d’associer des personnes professionnelles de la communication, qu’elles viennent du monde de l’entreprise ou de l’enseignement et de la recherche, dans un projet d’étude de la professionnalisation aux métiers et fonctions de la communication. Regroupant chercheurs et praticiens issus de plusieurs pays de la Francophonie, le RESIPROC a été constitué afin de comprendre les évolutions des pratiques en communication, d’interroger le rôle des formations universitaires en communication, de renforcer le dialogue entre les communautés professionnelles et universitaires et, in fine, de définir ce qu’il faut entendre par professionnalisation en et de la communication.
Présentation de l’Association française des managers de la diversité (AFMD)
L’AFMD est une association d’intérêt général fondée en 2007 par des managers soucieux et soucieuses de gérer au mieux la diversité de leurs collectifs de travail. Réseau, espace d’échanges et laboratoire d’idées, elle réunit aujourd’hui plus de 150 organisations (entreprises, institutions, collectivités, associations, grandes écoles et universités) mobilisées en faveur d’un cadre de travail inclusif et respectueux de chacun·e. L’AFMD et ses membres s’appuient sur les résultats de la recherche scientifique et la pratique quotidienne des professionnel·le·s pour travailler sur différentes thématiques en lien avec la transformation des fonctions managériales et la prévention des discriminations en milieu professionnel. Le partage, l’excellence et l’audace portent les publications et les outils qui sont issus de cette co-construction, ensuite mis à la disposition du plus grand nombre.
Bibliographie
ANDRÉANI, J.-C., CONCHON, F., MOULIN, J.-L., & VAISSIÈRE, G. D. (2008). La Communication de Diversité en Marketing : Approche exploratoire. Management Avenir, 15
BENDER, A.-F. (2004). Égalité professionnelle ou gestion de la diversité. Revue francaise de gestion, 151
BIDIMA, J.-G. (2007). La diversité culturelle africaine vue sous l’angle des médias. Diogene, 138 220(4), 138
BRASSEUR, M. (2008). Le rôle des stéréotypes dans le management de la diversité culturelle : Le cas de l’Afrique. La Revue des Sciences de Gestion, 230
BROUSSILLON G-A, MUTABAZI E., PIERRE P. et SEURRAT A. (2008). « The Figure of “Diversity Manager” in French Business », Effective Executive, IFCAI University Press India, pp.16-27
BROUSSILON G-A, PIERRE P. et SEURRAT A. (2007). « Vers une certification de la diversité dans les entreprises en France ? », Management et Avenir, n° 14, p. 137-149.
CERVULLE, M. (2021). Dans le blanc des yeux : Diversité, racisme et médias (Nouvelle éd.), Éditions Amsterdam.
DACHEUX, É. (2013). Le défi des SIC : Prendre en compte la pluralité de l’économie pour rendre compte de la diversité culturelle. Revue française des sciences de l’information et de la communication, 2
De DREU, C. K., & WEST, M. A. (2001). Minority dissent and team innovation : The importance of participation in decision making. The Journal of Applied Psychology, 86
DE LA BROISE, P. (2013). La lutte pour la reconnaissance ? Codes, chartes, référentiels et autres manifestes de professionnels français de la communication. Revue Communication & professionnalisation, 1, 33
DOYTCHEVA M. (2009). « Réinterprétations et usages sélectifs de la diversité dans les politiques des entreprises », Raisons politiques, vol. 35, n°3, p. 107-123
FACCHINI, F. (2008). Culture, diversité culturelle et développement économique : Une mise en perspective critique des travaux récents. Revue Tiers-Monde, n° 195
GARNER-MOYER, H. (2006). « Gestion de la diversité et enjeux de GRH ». Management Avenir, 7(1)
HOFSTEDE, G. (2003). Culture’s Consequences : Comparing Values, Behaviors, Institutions and Organizations Across Nations (2nd éd.). SAGE Publications, Inc.
KIYINDOU, A. (2013). De la diversité à la fracture créative : Une autre approche de la fracture numérique. Revue française des sciences de l’information et de la communication, 2
KUNERT, S., & SEURRAT, A. (2013). De la « publicité sociale » : Lorsque les marques communiquent sur « la lutte contre les discriminations » et la « promotion de la diversité ». Communication & Management, 10, p. 63-78.
LAULAN, A.-M. (2013). Communication et diversité culturelle. Revue française des sciences de l’information et de la communication, 2
MATTELART T., 2009, « Enjeux intellectuels de la diversité culturelle. Éléments de déconstruction théorique », Culture prospective 2009/2 (n°2), pages 1 à 8
MAIZERAY L., SCIBERRAS A., 2013,« Être responsable diversité : Une savante composition entre complexité et raison », Revue internationale de psychosociologie et de gestion des comportements organisationnels n°48 (Vol. XIX), p. 159 -169
ROGINSKY, S., MILLETTE J., LEPINE V., 2021, « Genre et Communication : quels enjeux pour les pratiques professionnelles en communication ? », Communication & Professionnalisation n°12
REBILLARD, F., LOICQ M. (dir.), 2013, Pluralisme de l’information et media diversity. Un état des lieux international, De Boeck, coll. « Culture & Communication », 2013
REDON, G., & LOUSSAIEF, L. 2017. La communication des Grandes Écoles françaises sur la question de la diversité. Management & Sciences Sociales, 23.
ROGINSKY, S. 2021. Quelle prise en compte du genre dans la communication publique ? : Revue Communication & professionnalisation, 12
ROGINSKY, S., MILLETTE, J., & LÉPINE, V. (2021). Genre et Communication : Quels enjeux pour les pratiques professionnelles en communication ? Revue Communication & professionnalisation, 12,
SENAC R., 2012, L’invention de la diversité, Paris, Presses Universitaires de France, coll. Le lien social.
SEURRAT A., 2010a, « Les médias en kits pour promouvoir « la diversité » », Les Enjeux de l’information et de la communication 2010/1 (Volume 2010), pages 160 à 169
SEURRAT, A. 2010b, Déconstruire les stéréotypes pour « lutter contre les discriminations » ? Le cas de dispositifs de « lutte contre les discriminations » et de « promotion de la diversité » dans les médias. Communication langages, 165
SCOTTO M-J, PRINCE L., CHAKROUN R., BOYER A., 2009, « Comparaison des formations à la diversité : la perception des étudiants et des professionnels est-elle un aiguillon vers l’action ? », Management & Avenir n° 28), p.250-267
VAN KNIPPENBERG, D., DE DREU, C. K. W., & HOMAN, A. C. 2004. Work Group Diversity and Group Performance : An Integrative Model and Research Agenda. Journal of Applied Psychology, 89
WOODWARD A., 2004, Building Velvet Triangles: Gender and Informal Governance. In PIATTONI Simona, CHRISTANSEN Thomas (dir.). Informal Governance and the European Union, Edward Elgar, p.76-93.
Lire l’appel au complet :
Appel à participation – Journée d’études EDI – Resiproc–AFMD
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